- Gerbert! Est-ce bien toi? Te voici donc revenu au pays? Quelle joie ce sera pour le père prieur qui se désole de t'avoir perdu!!
- Je ne rentrerai pas à saint géraud, la science ne m'a pas perdu. J'ai étudié. J'ai compris la sottise et découvert le secret de la puissance. Rien, tu m'entends? rien ne peut plus me résister.
- Même Dieu?
- veut tu que je te manifeste ma puissance, là, à l'instant? Tu pourras comprendre et rapporter au prieur et à tous les moines qui croient étudier au scriptorium de l'abbaye qu'ils savent moins que rien et que toutes leurs connaissances n'approchent pas les miennes. Tiens regarde!!!
Et, murmurant des paroles cabalistiques Gerbert battit l'eau de la Jordanne d'une simple baguette de coudrier . Aussitôt on assistât à un bouillonnement un rugissement véritable. On vit s'élever des profondeurs de son lit, des paillettes brillantes semblables à de l'or. C'était bien de l'or que les flots du torrent charriaient effectivement.
- De l'or, de l'or!! murmura Gerbert. Je suis le maître de l'or.
Muet de stupeur le religieux regardait lui aussi et s'était extasié. S'étant avancé, il se pencha près du bord. Les pépites devenaient de plus en plus nombreuses. C'était un véritable fleuve d'or qui coulait désormais. Il poussa un cri d'angoisse. Débordant des rives, l'eau s'était mise à monter à une vitesse vertigineuse et se répandit bientôt dans la prairie.
- Sauvons nous, cria Gerbert. Tous deux se mettent à courir. Mais l'eau allait plus vite qu'eux.
S'ils avaient pu atteindre les contreforts de la montagne ils eussent été sauvés, mais l'eau en grondant entravait leur marche.
Un vieux chêne éployait ses ramures assez basses à quelques pas de là.
- Là! là! cria Gerbert, cet arbre, il faut l'atteindre et grimper sur ses branches.
A peine étaient-ils juchés que les eaux bouillantes l'avaient déjà cerné. Plusieurs branches étaient recouvertes par les eaux.
Désespéré par la vue de la vallée qui se couvrait d'or, le religieux fit un grand signe de croix. Alors, nouveau miracle, l'eau s'arrêta net. Les flots se calmèrent peu à peu et cessèrent de mugir. La Jordanne apaisée rentrait à nouveau dans son lit, aussi vite qu'elle en était sortie. Les pépites disparaissaient peu à peu, pâlissant, se diluaient en une simple frange d'écume.
Eh bien, gerbert fit le religieux, tu as sans doute acquis une science merveilleuse, mais en délivrant les forces diaboliques as tu, pauvre apprenti sorcier oublié la puissance divine?
Gerbert ne répondit rien. sa science de la cabale lui paraissait désormais aussi vaine que dangereuse.
- Mon père si vous croyez qu'on veuille encore de moi. dans l'abbaye, je suis prêt à franchir pour toujours les murs du monastère. Et vous n'aurez religieux ou simple convers plus soumis et plus respectueux que moi.
- Gerbert! nous n'avons jamais cessé de t'attendre.
L'ancien pâtre passa donc à nouveau les murs de Saint Géraud. Il fut accueilli avec joie. mais il disparut ainsi du monde et on n'entendit plus parler de lui. Il avait volontairement oublié le secret du grand oeuvre. Et avec lui ce secret que le moyen âge devait chercher, fut définitivement perdu. Car peu de temps après, au cours de troubles, les musulmans de Barcelone massacrèrent le collège des docteurs juifs qui le détenaient et l'avaient révélé à Gerbert.
Et il n'est de toute cette aventure, resté qu'un témoignage très véridique. certains jours, la paisible Jordanne se met à couler plus vite et ses eaux prennent des reflets brillants, comme si elle roulait encore des paillette d'or, les paillettes de Gerbert
Si, souvent les légendes de la France profonde nous content des histoires erronées, la légende se trompe sur un point. Gerbert n'est pas resté dans l'oubli. Il est devenu pape sous le nom de Sylvestre II. Mais c'est vrais, la Jordanne prend toujours, certaines nuits de pleines lune des couleurs de miel, et les aurillacois (les goudots) qui étaient de grands naïfs venaient alors pêcher sur ses rives. les gens de la campagne les appelaient "les goundots pesca luno". (se prononce "Gouwdo pesquo luno").
Beau travail , belle histoire .
RépondreSupprimerIl se dit que le nom d'Aurillac vient du latin aurum = or , et que la Jordanne a effectivement transporté quelques pépites dans des temps immémoriaux .
Merci Vincent
RépondreSupprimersuperbe histoire bien contée et bien enluminée
et j'aime bien François de Lugdunum :o)
merci d'avoir arpenté mon récit, François. A très bientôt j'espère.
RépondreSupprimerNicole :
RépondreSupprimerQue nenni!! Je m'oppose à ce nom. Aurillac, vient du nom d'un patricien du nom de Aurum ou Aurus ou Auris (je sais plus) auquel on a ajouté "acum" la villa de A...
cmpris?
Bravo Vincent pour cette très belle histoire, merveilleusement contée et effectivement très bien enluminé.
RépondreSupprimerMerci Yannick.
RépondreSupprimerpour ton passage et tes compliments qui me touchent.
je te souhaite de joyeuses fêtes de fin d'année.
J'ai tout lu ! et avec grand plaisir !
RépondreSupprimerTu crois tout de même pas que j'allais mettre un com. à chaque épisode ?
Je ne connaissais pas ce petit pâtre devenu grand (remarque bien ! j'avoue mon inculture !)par contre j'ai adoré cette histoire. Merci Cantalou . Poutou.
Hallo Vincent,
RépondreSupprimerEn cherchant l'Afrique, je suis tombé sur tes trois histoires de Gerbert dont le monument se trouve au parking "Les Graviers".
Ton blog est vraiment captivant, tu y a investi beaucoup de temps.
Georg
hallo georg!!
RépondreSupprimerdrôle de détour en effet pour aller en Afrique.
merci pour le compliment
tchüss!!